L'exception culturelle francophone un cas de perversion

Publié le par Association Fraternité Franco-Africaine (FFA)

             L’EXCEPTION CULTURELLE FRANCOPHONE : UN CAS DE PERVERSION
 
            La composition du nouveau gouvernement Fillon a de quoi surprendre en apparence : pas moins de trois représentantes des minorités visibles dont deux revendiquent des convictions de gauche (Rachida Dati, Fadala Amara, Rama Yadé), autant de cadres du PS ralliés à la politique sarkozyenne (Bernard Kouchner, Jean Marie Bocquel, Eric Besson). La critique de cette stratégie dite d’ouverture a porté sur le débauchage d’élites, à contresens des orientations naturelles des camps représentés et visant à affaiblir l’opposition de gauche. Cette critique ne répond pas pour autant à la question de la réussite médiatique d’une telle opération, acceptée par ailleurs par les tenants de l’Etat UMP, en dépit de leurs préjugés raciaux ou partisans.
             En fait, un point commun existe entre ces deux types de nominations, la politique extérieure de la France et ses incidences en métropole, en matière d’immigration en particulier. En effet, Bernard Kouchner, Ministre des Affaires Etrangères, a fait une bonne partie de sa carrière de French doctor au chevet des malades africains du néocolonialisme :guerre du Biafra commanditée en sous-main par la France pompidolienne pour les intérêts de nos compagnies pétrolières, génocide rwandais dont la cohabitation Mitterrand-Balladur porte une part certaine de responsabilités… Nul doute qu’avec un tel actif, Kouchner respectera l’hégémonie présidentielle, le fameux domaine réservé. Sous ses ordres, le Secrétariat d’Etat aux Droits de l’homme, confié à la jeune et belle Rama Yadé d’origine sénégalaise, apparaît comme un alibi quand on connaît l’état pitoyable des relations entretenues entre Paris et les pays d’Afrique subsaharienne par exemple. De plus, le poste dévolu à Bocquel, celui de la Francophonie et de la Coopération, fera de ce dernier un commis apparemment humaniste, dans les faits discret et dévoué, de la France néocoloniale et de ses intérêts illégitimes, défendus par tous les gouvernements de la 5e République. Son homologue de l’Intérieur, Brice Hortefeu, ami personnel du Président, occupera d’ailleurs une part de ses attributions (le co-développement) et jouera, lui, la carte visible et sécuritaire, pour la France lepéniste, de la main de fer, celle de l « éloignement » des clandestins indésirables. Notons enfin que les DOM-TOM, malgré la popularité de leur cause, ne sont pas représentés.
             Une fois encore, l’hypocrisie de la « France des droits de l’homme » a bien fonctionné ; ces trois jeunes femmes sont censées bénéficier d’une politique anti-raciste : leur promotion servira t’elle pour autant la cause des banlieues laissées pour compte malgré la grave crise de l’automne 2005 ? Elles incarnent également l’opposition républicaine et progressiste aux fléaux attribués aux cultures des Suds : l ‘intégrisme musulman, le machisme patriarcal ou celui des grands frères des banlieues…C’est de bonne guerre, la question qui se pose étant de savoir pourquoi cette stratégie de l’Etat UMP est officialisée en l’absence de réalisation effective des gauches sur leur terrain naturel: l’équipe de campagne de Ségolène Royal était d’un blanc immaculé, Christiane Taubira et Malek Bouthy étant, malgré leur loyauté, encore largement sous-employés. Les gauches antilibérales, ATTAC et en fait tous les partis d’opposition sont bien en peine de rivaliser avec le pouvoir en termes de cooptation de cadres issus des minorités visibles.
           Au delà de cette question, c’est bien sûr d’orientation politique dont il s’agit. Confrontés au rouleau compresseur de l’Etat UMP, Etat hybride qui tire une part de sa capacité de nuisance de ses liens avec les dictatures du Sud, qui sait manier aussi bien le bâton que la carotte (comme le démontre l’inquiétant coup de force médiatique lors de la campagne pour les législatives), il nous faut sortir du carcan hexagonal et intégrer ce tiers exclu des débats publics qu’est la politique extérieure, les DOM-TOM, la « Coopération » et son corollaire, l’immigration. Certes, le sursaut électoral du deuxième tour des législatives a sauvé l’honneur, en particulier grâce aux questions sociales, celles de la défense du pouvoir d’achat (TVA sociale), de l’égalité devant les soins (franchise médicale), de l’avenir des universités…Cela dit, les paramètres traditionnels des gauches sont désormais insuffisants pour créer les conditions d’une alternative politique en France. Sortir de la confusion, de l’ambiguïté, de la régression psychologique, alimentés par un pouvoir qui joue sur le terrain des coups médiatiques et de la manipulation des symboles, nécessite de l’audace et de l’innovation en termes de programme. Faire le bilan de la gestion des relations franco-africaines, telle est la voie tracée par exemple par l’affaire Borrel, émergeant suite au black out de la Présidence chiraquienne, cautionnée en son temps par le gouvernement de la gauche plurielle. Comme l’a dit Ségolène Royal au soir du second tour des législatives, les relations Nord-Sud sont devenues un enjeu majeur à mieux maîtriser pour assurer l’avenir national. Chiche ! Nous appelons toutes les composantes progressistes du pays à prendre leurs responsabilités dans ce domaine de la vie publique.
 
               Fraternité Franco-Africaine (FFA)
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